La crise des crédits 2017 de la défense : une « tempête dans un verre d’eau » ?

La gestion de la crise des crédits 2017 de la défense par le président de la République est révélatrice du mode de fonctionnement de la nouvelle équipe au pouvoir.

Le 11 juillet le ministre des comptes publics, Gérald Darmamin, annonce le gel de 850 millions d’€ pour les crédits 2017 du ministère des armées, ce qui provoque une crise gouvernementale. En effet, la ministre des armées, Florence Parly, elle-même ancienne secrétaire d’État au budget dans le gouvernement Jospin, a été la première surprise. Il n’y a eu ni négociation ni information. Le ministre du budget a fait un coup de force en informant les médias de ce gel des crédits, le présentant comme définitif.

Jusqu’alors les négociations se passaient en coulisses entre le ministre du budget et le ministre des armées, accompagné de son chef d’état-major des armées. En cas de désaccord persistant, le Premier ministre devait arbitrer et en dernière instance, c’est le Président de la République qui tranchait.

Dans cette crise, le différend a été médiatisé. C’est l’annonce tout d’abord du gel des 850 millions d’€ par le ministre, puis la révélation publique des déclarations du Général de Villiers aux députés, lors de la réunion à huis clos de la Commission de la défense le 12 juillet.

Le Président, qui a prolongé d’un an le chef d’état-major des armées (CEMA) en lui donnant sans doute des gages pour qu’il reste, profite de la « garden party » organisée par la ministre des armées, la veille du défilé, pour réaffirmer publiquement son autorité et donner une leçon au CEMA devant tous ses subordonnés.

Le lendemain, le Général de Villiers participe aux côtés du Président au défilé mais il publie un article dans le quotidien Le Figaro et une réflexion sur les réseaux sociaux sur le thème de « la confiance ». Explique-t-il à travers ce blog ses rapports avec le Président quand il écrit que cette confiance « est marquée du sceau de la facilité. Parce que tout le monde a ses insuffisances, personne ne mérite d’être aveuglement suivi » ? Tout cela irrite au plus haut point l’équipe de l’Elysée.

Or au lieu d’étouffer immédiatement ce différend avec le CEMA en le convoquant et en lui demandant sa démission, le Président choisit d’alimenter la crise en la mettant sur la place publique à travers plusieurs déclarations, et en laissant intervenir le porte-parole du gouvernement, Christopher Castaner. Le plus étonnant, c’est que la démission du Général de Villers le 19 juillet ne calme en rien cet « acharnement médiatique » pour déconsidérer l’ancien CEMA auprès de l’opinion publique. Ce procédé est non seulement contraire aux bonnes règles de gouvernance mais surtout contre-productif auprès de l’opinion publique.

Le Président a par la suite qualifié cette affaire de « tempête dans un verre d’eau », mais cette crise lui a coûté une baisse de 10% de popularité dans les sondages à la fin juillet ! Encore quelques tempêtes de ce niveau et le verre d’eau risque de se vider sérieusement.

Ce qui est plus inquiétant, c’est la gestion politique de cette crise. Cela montre aussi une méconnaissance de l’institution militaire, de sa spécificité et de son fonctionnement. On peut légitimement se poser la question de la capacité de cette équipe à gérer une grave crise internationale. En tout cas, elle doit faire preuve de plus d’humilité, se méfier de l’utilisation des média et a encore beaucoup à apprendre si elle veut être plus efficace.

Patrice BUFFOTOT.

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